Retour sur la visite d’un jardin en permaculture dans le Kochersberg

Retour sur la visite d’un jardin en permaculture dans le Kochersberg

 

VISITE D’UN JARDIN EN PERMACULTURE le 4 SEPTEMBRE 2021 à GOUGENHEIM

Cette visite était organisée par le groupe local Alsace Nature Kochersberg.

Après l’accueil des participants, François ROBERT, notre guide, jardinier amateur et passionné, a présenté sa définition de la permaculture, avant de nous donner des conseils – avec mise en pratique –  pour la réalisation d’une lasagne, une des nombreuses techniques utilisée en permaculture :

« Qu’est-ce que la permaculture ?

J’en sais rien. C’est comme la biodynamie. Ca englobe tellement de choses au niveau de la terre, des plantes, de l’animal, de l’humain, qu’une définition sera forcément incomplète.

Un essai :

« Répondre aux besoins fondamentaux : manger, boire, vêtir….

Sans détériorer la planète et sans nuire aux autres êtres vivants. »

 

Je vais donc essayer simplement de dégager certains principes.

Ensuite nous verrons ensemble les différents éléments de la permaculture. Vous n’hésiterez pas à prendre la parole, parce que je pense qu’ il y a pas mal de jardiniers bio, qui, comme monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, font de la permaculture sans le savoir, au moins en partie. »

 

Eclairages :

« 1) Travailler avec la nature, pas contre elle.

L’homme fait partie de la nature, il n’est pas hors du système. Si nous travaillons contre la nature, nous travaillons contre nous-mêmes. Il s’agit donc de connaître le déroulement naturel des choses et de les utiliser à notre avantage, sans les surexploiter. Sinon court terme.

Le principe fondamental, c’est donc un rapport attentionné avec la terre, un rapport empreint de compassion, d’humanité, de sensibilité… »

 

« 2) Utiliser les ressources avec sobriété, de manière économe.

Nous sommes des hôtes sur cette terre. Il y en avait beaucoup avant nous, beaucoup viendront après nous. C’est notre devoir donc d’agir en préservant la nature et les ressources. Pour nos descendants et aussi pour la nature elle-même. »

 

« 3) Diversité.

La nature est diverse, notre culture doit l’être aussi. Et c’est la diversité qui stabilise le système. Exemple forêt. Cette diversité entraine la flexibilité et l’adaptation aux éléments, à l’assolement, aux prédateurs, au temps qu’il fait. Il n’est donc pas question de prendre le risque de se spécialiser dans une production, mais toujours d’avoir plusieurs possibilités. De toute façon la nature nous le montre. »

 

« 4) Agriculture paysanne.

Quand on voit actuellement en Europe ou ailleurs les exploitations des animaux pour œufs, lait ou viande, on ne peut plus parler d’agriculture, mais de production industrielle très éloignée de la nature. Les nutriments viennent généralement d’autres continents, sont fertilisés par des produits chimiques et des irrigations artificielles. Et ça, ça se fait aux frais des générations futures. Parce que aujourd’hui, pour arriver à équilibrer le budget de production il faut surexploiter le sol, les ressources et l’eau. Cela n’a rien à voir avec l’agriculture paysanne. C’est de l’exploitation. C’est pourquoi il faut utiliser ses propres ressources, pour que la terre reste fertile dans la durée. »

 

« 5) Traiter les bêtes avec respect et responsabilité.

Nos bêtes doivent se sentir heureuses chez nous. Et Seulement à ce moment-là elles seront en bonne santé et feront de bons produits. »

 

« 6) Unique et individuelle.

Le jardinier est souvent individualiste. Il écoute, mais il n’aime pas qu’on lui impose des choses, des manières de faire. Il fera toujours  ce qu’il a expérimenté, ce qui lui plait.

En permaculture c’est encore plus évident. Il s’agit de respecter ce qui t’est donné : la terre, l’eau, le climat, d’en connaître ses potentialités, de les utiliser au mieux… mais aussi de laisser s’exprimer ton individualité, ta culture, ta créativité. On ne peut être bien que dans ce qu’on aime faire.

Et dans ce cadre , il est évident qu’on peut intégrer les usages de nos prédécesseurs. Souvent en permaculture on se rend compte qu’on refait, qu’on redécouvre ce que les anciens ont fait avant nous. Cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas l’adapter, le faire nôtre, l’adapter à son temps et à son expérience. »

 

Après cette introduction sur la permaculture, nous avons fait la visite du jardin. François nous a expliqué sa manière de faire par quelques exemples et nous a appris comment faire une lasagne, une des techniques (parmi tant d’autres) utilisée en permaculture.

Télécharger les infos sur la lasagne

 

 

 

Poulailler dans le Kochersberg : le groupe local d’Alsace Nature réagit à l’enquête publique

Poulailler dans le Kochersberg : le groupe local d’Alsace Nature réagit à l’enquête publique

Le groupe local Alsace Nature Kochersberg est intervenu, par un courrier du 26 février 2021,  à l’enquête publique concernant l’extension d’un élevage de poules pondeuses plein air par l’EARL LUX à SCHNERSHEIM. Deux représentants du groupe local ont également rencontré le commissaire enquêteur pour préciser la position d’Alsace Nature.

 

Commentaires d’Alsace Nature

Le projet de poules pondeuses soumis à enquête publique prévoit la construction d’un second poulailler de 46 000 poules avec un parcours de 18,7 ha. Sur le papier, on peut se dire que l’approche est plutôt intéressante. Néanmoins, dans les faits, des bâtiments de 46 000 poules pour une production prétendument en plein air sont une mauvaise option. Il est souhaitable que cette dérive vers l’économie d’échelle s’arrête. L’abandon des cages-batteries est certes une bonne décision, qui est nécessaire, mais il est extrêmement dommage de choisir, au moment des nouveaux investissements, des systèmes qui sont loin d’avoir les qualités que l’on peut attendre en termes de bien-être animal, d’environnement et même socialement.

Nous allons tenter de montrer en quoi ce système pose des problèmes de notre point de vue sur ces différents points.

 

Sur le problème de la taille du bâtiment

46 000 poules sont manifestement de trop. Le bâtiment est trop large (22 m), cette grande largeur avec 2 rangées en étage rend compliqué l’accès des poules jusqu’aux trappes. A noter que dans le manuel suisse[1] qui sert à définir la densité maximale des poules pour chaque type de volière autorisé en Suisse, la totalité des exemples de calcul se base sur une largeur de bâtiment de 12 m ; ce n’est pas sans raison !  Et le jardin d’hiver y est la norme. On ne peut que regretter son absence dans ce projet. En effet, un jardin d’hiver contribue au bien-être des poules en leur permettant l’accès à un espace d’air frais et de lumière du jour.

 

Sur l’aménagement du parcours

Du côté Nord, les trappes du projet s’ouvrent sur un alignement d’arbres distant d’environ 14 m (cf. annexe 2). Il serait opportun de prévoir des haies plus proches du bâtiment pour faciliter la sortie des poules. Les haies auront également une croissance plus rapide que des arbres plantés récemment.

Du côté Sud, l’alignement d’arbres se trouvent à plus de 40 m du bâtiment en raison d’obstacles pour les poules en face de leurs trappes : bâtiment de fabrication d’aliment et son silo sur plus de 40 m de long d’un côté, hangar à fientes sur près de 20 m de l’autre côté. Les poules risquent de se concentrer à proximité du bâtiment et la charge en nitrates sur un périmètre restreint sera très élevée.

Une faible conviction pour cette sortie au plein air se révèle aussi par les phrases suivantes (sous A.2.4.) : des plantations seront organisées pour compléter les plantations existantes (arbres fruitiers par exemple). L’entretien du parcours se fera à l’aide d’un broyeur ou d’une faucheuse.

L’enjeu sur 18.7 ha aurait vraiment mérité des précisions ! Les poules ont besoin d’un couvert végétal pour oser sortir. C’est au niveau de la végétalisation que se joue en partie la crédibilité du système et le côté sincère ou trompeur de l’allégation « plein air » – cette allégation qui permet d’obtenir un meilleur prix de l’œuf. Les consommateurs tiennent au plein air, et il est malheureux d’observer actuellement un peu partout (y compris dans le Bas-Rhin) un engouement vers du pseudo-plein air, où le parcours est utilisé par quelques pourcents seulement des poules présentes, alors que pourtant tous les œufs sont étiquetés « plein air ». Et très peu de poules seront suffisamment téméraires pour explorer la totalité du parcours de 18.7 ha jusqu’à la clôture ! Le parcours sera donc fauché… parce que les poules impacteront assez peu la végétation, vu qu’elles ne sortent pas loin. Or une fois que le terrain est fauché, il apporte encore moins d’abri aux poules…  Mais il est évidemment plus simple de faucher s’il n’y a pas ou peu d’arbres ni d’arbustes autour desquelles il faut tourner en étant assis dans le tracteur. Tant pis pour les poules.

La biodiversité ou le climat (agroforesterie…), visiblement, n’ont pas mérité d’engagement très poussé. En effet, la plantation de nombreux arbres (sur le principe de l’agroforesterie) permettrait non seulement de créer un climat plus favorable aux poules (notamment en période de chaleur), mais serait également favorable à la biodiversité de manière générale.

 

Sur la densité de poules dans le bâtiment

La densité maximale autorisée est de 9 poules/m² de surface utilisable. Il aurait été correct d’indiquer comment est calculée et respectée cette densité pour le bâtiment de surface utile de 2574 m², quelles sont les surfaces comptabilisées au titre des étages des volières. La présentation de la volière de marque Fienhage en annexe 3 ne le dit pas. Pourtant les services vétérinaires doivent le savoir pour vérifier la conformité de l’installation. Ont-ils les données ? Et pourquoi n’a-t-on pas le droit de le savoir en amont ?

 

Sur le modèle économique

Le présent projet comprend des pondoirs collectifs où les œufs roulent automatiquement vers la bande de transport, et confirme ainsi son caractère industriel, au détriment de l’environnement et du bien-être des poules. Les œufs seront collectés par la firme BURELAND, basée à Brumath (67), très grosse structure du secteur.

Ce projet illustre à nouveau la politique des pouvoirs publics (et d’une partie du monde agricole) cherchant la compétitivité à tout prix, en mettant la pression sur les prix agricoles, avec les dérives que l’on observe, plutôt qu’une politique localisée et du juste prix.

Pourtant, on pourrait imaginer mieux. 15 élevages à 3 000 poules pourraient intelligemment remplacer ce projet, en apportant des revenus complémentaires à 15 familles d’agriculteurs, avec une ambition d’excellence cette fois-ci crédible. Ils pourraient en 15 endroits enrichir le paysage avec un parcours en arbres et arbustes, et agrémenter les promenades des familles, autour des villages.  Et vendre des œufs en direct, avec la plus-value du bien-être dans le terroir.

Ne serait-il pas jouable et souhaitable de relocaliser le conditionnement dans les élevages et la commercialisation dans les terroirs ?

 

Certains éléments du dossier suggèrent qu’il manque un conseil et une volonté déterminés pour assurer de bonnes conditions d’élevage et un « plein air » franc et sincère. En conclusion, Alsace Nature propose de revoir ce projet, au minimum en scindant les bâtiments en plusieurs unités plus petites de manière à permettre une meilleure gestion de l’environnement et un meilleur confort pour les animaux. Il serait également bienvenu de prévoir des plantations conséquentes d’arbustes et d’arbres.

[1] file:///C:/Users/annev/AppData/Local/Temp/1_(1)_f_FI_Kurzbeschreibungen_Haltungssysteme_Legehennen.pdf