lundi 12 Sep 2016 | Communiqués de presse
L’association Alsace Nature, représentée par Maître François Zind, avocat au barreau de Strasbourg, a déposé le 20 juillet 2016, « un recours en contestation de la validité de la convention de concession passée entre l’Etat et la société concessionnaire de l’autoroute de contournement ouest de Strasbourg pour le financement, la conception, la construction, l’entretien, l’exploitation et la maintenance de l’autoroute A355, approuvée par décret n° 2016-72 du 29 janvier 2016 ».
La fédération régionale des associations de protection de la nature en Alsace a vocation à préserver l’environnement sur son territoire. Or, « le projet aura d’importantes conséquences, directes et indirectes, sur l’environnement, tant en matière de qualité de l’air, d’hydraulique, de protection des zones humides et des espaces agricoles naturels et des espèces qu’en termes paysagers ».
« En matière de qualité de l’air, les conséquences les plus notables du projet consistent en :
- un accroissement des émissions de CO2 de + 58% en hypothèse haute de trafic ;
- un accroissement du trafic et donc de la pollution liée sur les radiales de Strasbourg notamment RN4 et A351 ;
- un accroissement des émissions de CO et de Benzène ;
En matière d’hydraulique, le projet est susceptible, en traversant des cours d’eau, de perturber leurs conditions d’alimentation ou d’écoulement. De plus, les emprises peuvent réduire le champ d’expansion des crues. Ceci est particulièrement sensible pour la Bruche et le Bras d’Altorf ainsi que sur la commune de Vendenheim pour le Landgraben. (…) Le projet provoque également la disparition d’environ 6 hectares de prairies humides en vallée de la Bruche.
En matière de préservation des espaces agricoles, il est constant que le projet consomme plus de 300 hectares de Surface Agricole Utile et a un effet déstructurant pour le parcellaire dans le cadre des aménagements fonciers agricoles et forestiers.
Il a de la même manière un impact sur les bois et forêts puisqu’il provoque la disparition de 30 à 40 hectares de surfaces boisées dans les forêts de Grittwald, Lampertheim, Geudertheim et Mundolsheim et détruit le site de la forêt alluviale de Kohlenplatz (47 ares), propriété du Conseil Général et géré par le Conservatoire des Sites Alsaciens.
S’agissant de la trame verte et bleue régionale, le projet viendra aussi couper six corridors écologiques et détruire deux réservoirs de biodiversité identifiés dans le Schéma Régional de Cohérence Ecologique adopté par arrêté préfectoral en date du 22 décembre 2014.
En matière de protection des espèces, la construction de l’autoroute A355 va provoquer la fragmentation et la destruction de l’habitat de nombreuses espèces protégées, parmi lesquelles le Grand hamster et d’autres mammifères, des amphibiens, des insectes et des oiseaux. (…)
Enfin, en matière d’impact du projet sur les paysages, l’impact visuel est qualifié de fort pour les riverains concernés par la présence des échangeurs ou de passages en remblai. Le projet engendrera une coupure d’unités naturelles diversifiées ainsi que d’importants fils d’aménités régionales ainsi que de solidarités intercommunales. »
Dans son recours, Alsace Nature soulève également la question de l’opacité et de l’illégalité des conditions financières d’attribution de la concession au groupe Vinci (éléments financiers noircis dans les annexes transmises à l’association, montage financier provisoire et non-finalisé à la signature du contrat,…). Elle estime que la société concessionnaire de l’autoroute « n’est pas à même de garantir l’exécution du contrat dans l’ensemble de ses clauses » et notamment « celles qui peuvent apparaître comme étant les plus secondaires pour un constructeur, à savoir celles relatives à la préservation de la nature et des espèces, nullement garanties ».
Autre point soulevé dans le recours contre le contrat de concession : il modifie les caractéristiques essentielles de l’opération déclarée d’utilité publique par le décret du 23 janvier 2008.
« La DUP prévoyait la construction d’une autoroute à 2X2 voies élargissables à 2X3 voies par l’intérieur, alors que le contrat attaqué prévoit la construction d’une autoroute de 2X2 voies élargissables à 2X3 voies par l’extérieur. (…).
Par ailleurs, le viaduc prévu à hauteur de Vendenheim, qui devait être de 12 mètres de hauteur, est aujourd’hui envisagé à plus de 16 mètres de hauteur. La tranchée couverte a été déplacée vers l’ouest, exposant ainsi de nombreuses habitations d’un lotissement situé à moins de 80 mètres de l’infrastructure aux nuisances générées par celle-ci.
Une construction connexe à l’autoroute a été également déplacée par rapport au projet présenté au public, à savoir, l’aire de service d’une superficie de 18 hectares qui devait initialement se situer sur le ban de Ittenheim a est déplacée sur le ban de la commune de Griesheim-Sur-Souffel.
De surcroît, le nouveau projet créé deux nouvelles constructions qui en changent radicalement l’identité : une aire de stockage des camions d’une superficie de 6 hectares et un pôle multimodal positionné au droit du diffuseur entre la RN4 et l’A355 qui n’était pas prévu initialement.
Ces modifications substantielles entraînent nécessairement une augmentation du montant du projet présenté au public en 2006, qui était de 355 millions d’euros alors qu’il s’élève dans le projet concédé à 518 millions, et même à 700 millions en comptant les frais de financement. Le montant actuel du projet correspond ainsi au double de celui dont l’utilité publique a été déclarée. »
Outre l’extension des périmètres concernés directement, les aménagements fonciers agricoles et forestiers font l’objet d’une demande d’extension de 3 000 ha passant ainsi potentiellement de 7 000 à 10 000 ha sur l’ensemble du tracé. : « Ces aménagements fonciers n’ont fait l’objet d’aucune évaluation environnementale, et aucun dépôt de dossier de demande de dérogation pour les espèces protégées n’a été déposé ». Cette extension entraînera des atteintes irréversibles à la biodiversité, avec des espèces protégées impactées (Pélobate brun, Grand hamster).
L’association estime que les mesures d’évitement, de réduction ou de compensation des impacts sur les espèces sont en-deçà des enjeux réels du territoire. Elle conteste l’efficacité des mesures « hamster » (passages à faune, mesures agri-environnementales…) et déplore qu’aucune autre espèce protégée impactée de fasse l’objet de mesures compensatoires dans le contrat.
vendredi 26 Août 2016 | Communiqués de presse
Dans plus de 20 pays, des ONG se mobiliseront le 29 août 2016 dans la cadre d’une journée d’action nommée « DES ANIMAUX PAS DES MARCHANDISES » pour dire STOP aux transports d’animaux sur de longues distances.
A Strasbourg, Alsace Nature, AnimAlsace et WELFARM (Protection mondiale des animaux de ferme) relayeront cette action de sensibilisation internationale et distribueront des tracts sur la place Kléber le lundi 29 août de 15-18h. Venez nous rencontrer.
Les transports d’animaux vivants sur de longues distances doivent cesser. En effet, plus les trajets sont longs, plus les risques sont grands (déshydratation, blessures, accidents…). Chaque année, plus de trois millions d’animaux sont exportés des pays membres de l’UE vers des pays tiers. Dans les pays destinataires le respect des règles de protection animale est encore moins assuré qu’en Europe.
Cette journée d’action mondiale est coordonnée par CIWF:
http://assets.ciwf.org/media/7428507/flyer-desanimauxpasdesmarchandises.pdf?utm_campaign=transport&utm_source=actionemail&utm_medium=email
Eurogroup for animals, la fédération européenne de protection des animaux, dans sa campagne « Stop the trucks », conduit une pétition, et une lettre type, diffusée par Welfarm, au Ministre Stéphane Le Foll pour lui demander de « s’associer à l’initiative émanant des gouvernements allemand, néerlandais, danois, suédois, autrichien, demandant une révision de la règlementation encadrant les transports d’animaux vivants, mais aussi de soutenir publiquement cette révision au nom du gouvernement français. » Il s’agirait au moins de limiter des transports à 8 heures pour les bovins, ovins et caprins, et à 4 heures pour les volailles.
La France est le plus gros pays exportateur européen de bovins et le troisième exportateur d’ovins.
Le nombre d’animaux exportés hors de l’Union européenne continuera d’augmenter si nous ne réagissons pas.
Alsace Nature s’intéresse, comme d’accoutumée, au contexte économique qui, par la pression sur les prix de la mondialisation, n’accorde guère de valeur ni d’intérêt à l’animal individuel et ses souffrances, pourvu que la production se maintienne et se développe.
Télécharger le tract
jeudi 21 Juil 2016 | Agriculture et Alimentation, Agriculture et nature vivante, Aménagement du territoire, Communiqués de presse, Nature, Presse, Transports
Communiqué de presse – Alsace Nature – Plainte contre le GCO
Mercredi 20 juillet 2016
Avec le GCO, la France s’assoit sur ses engagements européens : Alsace Nature porte plainte
Depuis plusieurs mois, les services de communication de l’État, de la CCI du Bas-Rhin et de la multinationale Vinci vantent les mérites de leur projet d’autoroute à 700 millions d’euros, si moderne et porteur de solutions à la pollution de l’air, la congestion de Strasbourg, la dégradation de la biodiversité, etc.
Or, le projet de Grand Contournement Ouest de Strasbourg (GCO) n’a non seulement rien de novateur (il date des années 1970 !), mais il viole carrément deux directives européennes que l’État français a ratifiées. C’est le sens des plaintes qu’a adressé Alsace Nature à la Commission européenne et du courrier d’information adressé à la Banque européenne d’investissement (BEI)
Une directive Habitat-Faune-Flore foulée au pied
Rappelons que la France s’est vue condamnée le 9 juin 2011 par la Cour de justice de l’Union européenne pour « insuffisance de mesures de protection du Grand hamster » au titre de la directive Habitats Faune Flore (directive 92/43/CEE). Cinq ans après, la fédération alsacienne des associations de protection de la nature constate que rien n’a changé pour l’espèce, bien au contraire : sa régression se poursuit. Ce qui n’a pas empêché le Premier ministre de signer en janvier 2016 un acte de concession permettant de lancer la construction du GCO, qui viendra encore fragmenter l’habitat du hamster. Si jusqu’à présent la Commission européenne avait suspendue une condamnation pécuniaire de la France, le GCO pourrait coûter à l’avenir des millions d’euros d’amende aux contribuables !
Étude d’impact, vous avez dit ?
Dans sa précipitation à ouvrir un nouveau chantier pour le géant du BTP Vinci (le même qu’à Notre-Dame-des-Landes !), la France a oublié l’un de ses autres engagements : celui d’évaluer les incidences environnementales des grands projets publics et privés (directive 95/337/CEE). Or, le GCO viole plusieurs règles édictées par cette directive. Exemple : le projet n’a été soumis à aucune autorité environnementale sérieuse. Pas étonnant, si l’on en juge par les dégâts que cette autoroute causerait sur les populations d’espèces protégées, des milieux aquatiques, des zones humides et des corridors écologiques présents sur le tracé ! Enfin, le projet ayant d’inévitables répercussions côté allemand, la France est tenue de notifier le projet à nos voisins d’outre-Rhin, ce qu’elle n’a pas fait.
Dans ce contexte, Alsace Nature vient de saisir la Commission européenne pour non-respect de ses directives et adresse en parallèle un courrier d’information à la BEI, qui semble vouloir s’engager dans le projet de GCO. En effet, la Banque européenne d’investissement est très attachée au respect de principes sociaux et environnementaux pour consentir au financement d’un projet.
« Ces plaintes sont un nouveau pas dans le combat juridique contre le GCO et d’autres recours sont à venir. Rappelons que si cette autoroute avait pour but d’améliorer le quotidien des Alsaciens, nous accepterions de discuter des modalités. Mais les conséquences du GCO seront catastrophiques à tous les niveaux : encore plus d’embouteillages, une qualité de l’air toujours plus dégradée, la perte de terres agricoles et l’érosion de la biodiversité. GCO 2016, tous perdants ! » déclare le président régional d’Alsace Nature, Daniel Reininger.
jeudi 21 Juil 2016 | Communiqués de presse
Après avoir imposé l’arrêt du réacteur n°2 de la centrale nucléaire de Fessenheim depuis le 13 juin, l’Autorité de Sureté Nucléaire vient enfin de prendre, ce 18 juillet, la décision qui s’imposait : elle a suspendu le certificat d’épreuve d’un générateur de vapeur de la centrale nucléaire de Fessenheim, affecté par des irrégularités détectées dans l’usine Creusot Forge d’Areva ! Par voie de conséquence, l’ASN n’autorise pas, et pour longtemps, le redémarrage du réacteur 2, le risque serait trop grand !
Une lecture attentive du dossier permet de constater que depuis 2008 les ateliers du Creusot savaient que l’acier de la virole basse du générateur de vapeur incriminé posait problème ; mais pour autant, Areva NP l’a mise en oeuvre dans le Générateur de Vapeur (GV) installé en 2012 à Fessenheim, au nez et à la barbe de l’ASN qui, comme trop souvent, a fait confiance à la « bonne foi » de l’exploitant EDF. Le « gendarme du nucléaire » a donc été, en l’occurrence, carrément trompé par des documents falsifiés !
Cette même EDF à Fessenheim n’avait-elle affiché en grosses lettres sur la clôture de la centrale ancestrale de Fessenheim « La centrale est sûre, qu’elle dure » ? Imposture destinée à tromper l’ensemble des populations qui vivent au quotidien le risque d’un accident grave !
Mensonge digne d’un délinquant !
Imposture également à l’égard des salariés qui, n’en pouvant plus de ne plus savoir si l’actuel gouvernement tiendra ou non la promesse prise en 2012 (la même année !) par le Chef de l’État de fermer définitivement et irrémédiablement la centrale la plus vieille de France, construite sur une faille sismique, avait-il rappelé, se sont raccrochés à ce miroir aux alouettes.
Maintenant il est temps ! :
- Il est temps que l’ASN, qui fait preuve d’une rigueur appréciable, cesse de lancer a contrario de nouvelles bouées de sauvetage au lobby nucléaire, comme elle l’a déjà fait pour le couvercle de l’EPR et comme elle le fait présentement pour le GV de Fessenheim 2, en proposant à Areva NP de déposer… un nouveau dossier !… Ne suffit-il pas à l’ASN d’avoir été trompée lors du premier dossier ?
- Il est temps que le Président du Conseil Départemental nomme à la présidence de la CLIS (Commission Locale d’Information et de Surveillance) de Fessenheim, un homme ou une femme intransigeant et impartial, en remplacement de Michel Habig auquel on ne peut plus faire confiance. Aussi, que les élus locaux prennent en considération la dangerosité du site et se mobilisent enfin à sa reconversion !
- Il est temps que l’on arrête d’injecter des millions d’euros dans cette centrale à bout de souffle, d’autant plus que c’est l’argent des Français puisque l’Etat est son principal actionnaire à 84,5% et que tout prouve désormais que cette centrale est déficitaire.
- Et surtout, il est temps que Madame Ségolène Royal respecte les engagements de Monsieur François Hollande, qui rappelait encore il y a peu que le décret d’abrogation de l’exploitation de la centrale nucléaire de Fessenheim serait pris fin juin 2016, pour un arrêt effectif fin 2016. Assez tergiversé, il est désormais de sa responsabilité d’agir, et vite !
Après ce nouvel événement grave, qui ne fait que rallonger la liste impressionnante des problèmes recensés à Fessenheim, nos associations EXIGENT que le décret de fermeture de cette centrale soit pris IMMEDIATEMENT et que l’arrêt soit effectif et irréversible, ces toutes prochaines semaines.
Trop c’est trop ! On nous a tous trop trompés, FESSENHEIM ÇA SUFFIT !
CSFR (Comité pour la Sauvegarde de Fessenheim et de la plaine du Rhin)
Stop Transports – Halte au Nucléaire / Stop Fessenheim / Collectif des Citoyens Vigilants des environs de Fessenheim / Fédération Alsace Nature
lundi 27 Juin 2016 | Agriculture et Alimentation, Agriculture et nature vivante, Alsace, Bien-être animal, Communiqués de presse, Presse
Communiqué de presse du 23 juin 2016
Alsace Nature – Réseau agriculture
Reprise de l’abattoir de Holtzheim : l’occasion de « monter en gamme »
La coopérative de producteurs de bovins et de porcs qui gère l’abattoir de Holtzheim (Eurométropole) est placée en redressement judiciaire, et ce malgré les importantes aides qui lui ont été apportées au fil des ans. L’abattoir est en attente d’un repreneur.
Ce contexte de crise de l’élevage bas-rhinois amène Alsace Nature, Fédération régionale des associations de protection de la nature et de l’environnement, à rappeler, comme l’ont fait des éleveurs tels que Thierry Schweitzer ou Laurent Klein, que c’était une erreur stratégique d’avoir positionné cet abattoir essentiellement sur la production de volumes de viandes quelconques, fussent-elles alsaciennes. En effet, l’Alsace ne produit qu’une faible part de sa consommation et le bassin de consommation alsacien pourrait aisément absorber une production locale dont le mode de production serait plus « haut de gamme » que le modèle dominant.
Alsace Nature, par la voix des responsables de son réseau « agriculture », se souvient avec tristesse et amertume des nombreuses enquêtes publiques et autres occasions au cours desquelles l’association demandait notamment aux producteurs de porcs alsaciens de s’orienter vers des modes de production plus ambitieux et plus respectueux des animaux, en particulier de leur accorder une litière de paille et de bannir les cages à truies (ce que la Suisse a su faire depuis longtemps). Jamais nous n’avons été écoutés.
Les Commissaires enquêteurs (à une exception près), l’administration ou les élus ont toujours suivi les professionnels dans leurs certitudes économiques, plébiscitant une production conventionnelle, industrielle, banale. Or, la consommation de viande baisse inéluctablement. Les citoyens s’interrogent de plus en plus sur le traitement réservé aux animaux et sur les impacts de l’élevage intensif sur l’environnement.
Alsace Nature et son réseau « agriculture » considèrent que la crise actuelle est une opportunité pour un revirement salutaire. Aujourd’hui, le défi est de pouvoir justifier d’une plus-value avec une prestation supérieure, tant en matière de bien-être animal qu’en matière d’environnement et de conditions de travail. A l’heure où l’information est de plus en plus facilement accessible, les cahiers des charges des productions animales doivent comporter des exigences concrètes, pertinentes, transparentes. C’est ce qui correspond à la Responsabilité Sociale des Entreprises. Quant à l’abattage des animaux, Alsace Nature partage l’analyse des experts qui préconisent une vidéosurveillance permanente pour garantir un traitement correct des animaux tant qu’ils sont vivants.
Contact Presse :
Anne Vonesch – Vice-présidente Alsace Nature – Réseau Agriculture : 06 89 66 71 50
vendredi 3 Juin 2016 | Communiqués de presse, Non classé
La Suisse a inauguré le tunnel ferroviaire le plus long du monde, plus de 57 km sous les Alpes. Au-delà de la prouesse technique et de l’importance des travaux que cet ouvrage représente, ce tunnel est une concrétisation de la volonté politique Suisse en faveur de solutions de mobilités efficaces et respectueuses de l’environnement.
En effet, c’est lors d’une votation en 1987 que les Helvètes ont adopté le plan « Rail 2000 », consistant à inverser la tendance à l’abandon du ferroviaire d’après-guerre, en augmentant l’attrait de ce dernier : modernisation et optimisation des matériels, des infrastructures, augmentation de la qualité des services à la fois pour les voyageurs et pour le fret.
Une des déclinaisons du plan « Rail 2000 » a été l’application de la taxe poids lourds (RPLP) assurant d’une part le financement et favorisant d’autre part le report des camions vers le train, notamment via le ferroutage.
Le tunnel du Gothard (57km) est une autre déclinaison du plan « Rail 2000 », qui, en plus d’agir pour les mobilités douces, crée de l’emploi !
Aujourd’hui, près de 40% du fret en Suisse est transporté par le rail alors qu’en France, c’est au mieux 12%.
Les Suisses ont décidé d’agir pour ne pas subir.
Le transport de marchandises par la route engendre de nombreuses nuisances : congestion des réseaux routiers, pollution de l’air, dérèglement climatique, aggressions sonores, problèmes de santé variés avec décès associés et accidents de la route, ainsi que dégradation continuelle des enrobées. En outre, il contribue fortement à la consommation de terres agricoles et naturelles pour installer des zones logistiques et construire toujours plus d’autoroutes justifiées par l’accroissement du trafic poids lourds.
Localement, ces nuisances se font notamment ressentir dans les traversées des principales agglomérations alsaciennes mais aussi dans les Vosges. La situation n’y est plus tenable, d’autant qu’il existe que peu d’alternatives, faute de politiques publiques ambitieuses telle que « Rail 2000 ».
Pire, c’est la schizophrénie : pour assurer des niveaux de revenus minimum aux sociétés privées d’autoroute, l’Etat, grand chantre de l’écologie durant la récente COP21, encourage le trafic camion par l’aménagement de routes nouvelles, tout en maintenant les sous-investissements dans le secteur du rail et de la voie d’eau… Comprenne qui pourra. Y-a-t-il un psychiatre dans la « maison qui brûle » ?
Pour illustrer cela, voyez par exemple le cas du projet de GCO à péage aux portes de Strasbourg, mais aussi celui du tunnel Maurice Lemaire sur la RN59. En témoigne ainsi le récent accord entre l’Etat et APRR (concessionnaire du tunnel) en faveur de la baisse du tarif du péage du tunnel pour les camions (de 68€ à 28€) contre un chèque de 30M€ donné par APRR à l’Etat pour accélérer la construction de la déviation de Châtenois et contraindre tous les camions à l’emprunter. Cela s’effectue au détriment des populations des vallées concernées et évidemment sans les consulter.
Inspirons-nous de la politique Suisse !
Le ferroutage, qui a démontré son efficacité en Suisse (73% du transit par ce moyen) peut être décliné dans la traversée des Vosges. La proposition consiste au réemploie de l’ancienne ligne ferroviaire entre Sélestat et St-Die-des-Vosges (42km, dont 24km existants), dont les emprises ont été préservées, pour y accueillir les trains navettes de ferroutage.
Les gares ferroviaires de Sélestat et St-Die sont situées à la croisée de lignes ferroviaires électrifiées d’importances, bénéficiant de larges emprises foncières et à proximité de réseau autoroutier, facilitant la création de pôles de ferroutage.
Le tunnel Lemaire retrouvera ainsi sa vocation ferroviaire initiale, bordée de part et d’autre (Ste-Marie-aux-mines et Lusse) de gares « auto-trains » pour le franchissement du massif par les
autos, à l’instar du Lötschberg (Suisse).
En complément de la navette de ferroutage, la ligne rouverte pourra proposer une offre de trains TER, plus rapide et confortable que les cars. L’intérêt de la proposition est ainsi double.
Cette solution offre une vraie alternative pour réduire les risques routiers par l’effacement des camions sur les routes et les cols vosgiens, tout en diminuant la pollution de l’air et les autres nuisances évoquées plus haut. Elle limite les émissions de bruit (un train transporte 40 camions en une fois) et offre une perspective de développement soutenable des vallées vosgiennes. Les embranchements ferroviaires des industriels seront pérennisés (société Hartmann).
Les Régions sont devenues Autorité Organisatrice de la Mobilité depuis 2015 : en conséquence, elles détiennent le pouvoir d’agir, y compris en matière de fret. Localement, nous disposons d’un industriel (Modalohr) spécialisé en ferroutage : toutes les cartes sont ainsi disponibles pour agir !
Le montant de l’investissement à consentir est largement à la hauteur des enjeux économiques et environnementaux du Grand Est.
Agissons avec des solutions qui ont fait leur preuve.
Arnaud Schwartz
Responsable du réseau énergies d’Alsace Nature & Secrétaire National de France Nature Environnement