« Alors que les associations de protection de la nature, représentées par France Nature Environnement, ont pris part à l’opération « Agriculture – environnement : de la crispation à la médiation » le 27 septembre dernier, Alsace Nature, fédération des associations de protection de la nature alsacienne, vient de voir ses locaux dégradés par le dépôt d’un tas de fumier devant sa porte. Leur participation constituait pourtant une première pierre pour sortir de l’incompréhension qui existe actuellement et cette reprise de dialogue avait fait l’objet d’un soutien des ministres de l’Ecologie et celui de l’Agriculture.
Pendant que le monde agricole alsacien manifestait ce matin dans la capitale strasbourgeoise pour dénoncer l’inadaptation de la Directive Nitrates aux fonctionnement des entreprises agricoles alsaciennes, un tracteur portant un drapeau de la FDSEA s’est rendu devant la maison des associations de protection de la nature (rassemblant Alsace Nature, la Ligue pour la Protection des Oiseaux, Odonat, le Groupe d’Etude et de Protection des Mammifères d’Alsace, BUFO et le pôle nature et biodiversité de France Nature Environnement) pour y déverser une benne de fumier. Sans même avoir pris la peine de justifier ce geste ou d’en donner la moindre explication, les protagonistes ont filé avant même que les divers occupants des lieux n’aient pu engager une discussion.
Alsace Nature et ses associations fédérées et France Nature Environnement déplorent ce type d’acte et n’en comprennent pas la signification. Alors que l’enjeu principal est de réconcilier l’agriculture et les enjeux environnementaux, ce dépôt de fumier donne une bien mauvaise image d’une partie de la profession et de ses capacités d’entendre les préoccupations de la société.
Maurice Wintz, Président d’Alsace Nature, déclare « alors que nous faisons de très nombreuses ouvertures au dialogue vers la profession nous déplorons ce type de procédé. Nous attendons de la part des dirigeants des organismes professionnels agricoles qu’ils prennent clairement position face à ces exactions ».
Pour Bruno Genty, Président de FNE : « Il est clair que cette action malveillante est un obstacle sur le chemin du dialogue. La balle est dans le camp des dirigeants des organisations professionnelles agricoles. »
Il n’y a aucun dialogue a mettre en place avec les agriculteurs ! Laissez les tranquilles ! Ils ont bien assez de soucis déjà, et sont au premier plan quant au respect de l’environnement du fait des différentes lois d’orientations agricoles . Seulement ça, vous n’en parlez pas, alors cessez la langue de bois, cessez ce harcèlement, sortez de vos bureau et rendez vous compte de la réalité ! Beaucoup d’agriculteur n’aiment pas traiter mais y sont obligés, et le font à très base dose en respectant l’ensemble des normes environnementales. Allez plutot harceler les particulier qui font n’importe quoi dans leur jardin, la sncf qui traite les voie au glyphosate pur !Aller chercher les vrais ennemis de la nature et laisser faire les professionnels !
je rajouterai là que l’acte de soit disant vandalisme n’est que l’expression d’un ras le bol général d’une branche professionnel a laquelle on impose tout mais dont on ne reconnait rien.
Agriculteurs comprenez qu’on est pas contre vous, vous êtes victimes du système. Cependant on ne peut plus détourner le regard face aux problèmes environnementaux et ensemble on peut s’en sortir. Vous vous en prenez aux éco-citoyens, qui sont pourtant les seuls à comprendre vos problème financiers, votre dépendance aux firmes agro-chimique. Vous vous en prenez aux seuls citoyens qui sont prêt a payer plus cher vos produits (en attendant que l’Etat vous aide ds votre conversion). Vous vous en prenez aux seuls citoyens qui considèrent que votre métier est le plus beau métier du monde. Ne nous disputons pas, travaillons ensemble à un monde meilleur.
Il y en a ras-le-bol de la polémique entre agriculteurs et Alsace Nature. Il y a vraiment mieux à faire avec le temps dont on dispose. Il y a beaucoup d’agriculteurs qui sont sensibles, qui reconnaissent « qu’on a été trop loin », qui font de leur mieux (hélas sans obtenir de reconnaissance économique). Pas de conflit à avoir.
Il y a ensuite quelques réalités : échec d’Ecophyto, pollution de l’eau et de l’air, cages-batteries et similaires, régression de la biodiversité et notamment des zones humides, des lois insuffisantes, inappliquées, inadaptées, injustes. Pourquoi ? Comment en sortir ? Reste à partager les responsabilités. C’est pourquoi Alsace Nature se différencie par sa reconnaissance forte des enjeux économiques et sa campagne pour « des Prix justes pour le respect du vivant ».
Par contre, « Laissez-nous tranquilles » n’est pas une option pour une profession qui touche 56 milliards de la PAC, qui gère la majorité du territoire avec ses machines et qui produit la nourriture de tous les autres. Une chose est certaine : le principe « oui à l’argent, non aux contraintes » n’est plus tenable comme position de négociation.
Il n’y a plus de dialogue à envisager avec une association qui s’essuie en permanence les pieds sur l’agriculture. FNE fait du dogmatisme en décrivant son agriculture idéale, qui est en réalité celle d’un monde paysan révolu. Celle qui représente des marchés de niche, celle qui ne nous permet pas d’alimenter le peuple français, celle qui ouvre la porte aux importations. Le monde change, les pratiques évoluent et les chefs d’entreprises agricoles en ont assez d’être insultés. Cela dit, verser du fumier n’est pas la manière la plus judicieuse de s’exprimer.
Suite au déversement de fumier devant le siège d’AN, on peut penser que ce sont des jeunes agriculteurs, et qu’il faut peut être les excuser car ils ne savent pas très bien ce qu’ils font.
Marc Dufumier est bien entendu fier de porter son nom alors que pour ces agriculteurs, le fumier porte une symbolique dont il serait très intéressant de leur demander ce que cela signifie exactement.
Il est vrai que les rapports historiques avec le fumier et le purin portent en milieu agricole une part sombre (suicide dans la fosse par exemple).
Je me souviens aussi du magazine du Conseil Général du Haut-Rhin présentant sur sa couverture une femme croquant une pomme avec le titre « l’environnement à belle dent », sans doute une sorte de blague de potache en provenance des acteurs agricoles.
En rappelant aussi l’épisode de la vache folle ou encore les céréales dans les chaudières, on peut faire l’hypothèse que la partie émergente et militante du monde agricole productiviste soumet notre vieille culture occidentale dans ses dimensions symbolique et mythique, à rude épreuve.
Ces agriculteurs sont confisqués par la technologie et l’économie. Le fait d’oser titiller les dimensions fondatrices de notre culture autour des sens de déchet/mort/grain de blé/manger l’environnement/vache carnivore…montre les dégâts des croyances dans le réalisme économique et technique.
Dans la Genèse, Eve croquant la pomme est pourtant aussi d’un beau réalisme puisque c’est l’apprentissage laborieux de l’altérité (pour ne pas s’entredévorer il fallait un pôle divin extérieur). L’écologie, dans sa dimension culturelle reprend ce que l’humanité avait deviné précocement : aujourd’hui, pour survivre, il faudra aussi l’altérité avec la nature.
L’action des agriculteurs envers Alsace Nature était vraiment mal ciblée, d’autant que les deux parties défendent souvent des causes communes malgré des oppositions de façade.
Dommage que ces exactions commises le 13 novembre à Strasbourg aient pu contribuer à salir, souvent inutilement, la profession, car si quelques uns se sont laissés aller à ces débordements, que ce soit par colère, rancune ou par désespoir, la majorité des agriculteurs ne sont pas des vandales, pas même des pollueurs, et il est très facile de jeter la pierre sur l’ensemble de la profession.
C’est plutôt le « système » et ses contradictions qui sont en cause, avec une concurrence toujours exacerbée. Des actions que les ruraux ont été poussés à mener et qui leur sont souvent reprochées plus tard : sommés de produire, il leur a été reproché de produire trop… tout en les poussant à la rentabilité. Leurs produits devaient être beaux, esthétiquement parfaits pour être vendables, souvent à la demande des consommateurs… ces derniers leur ont reproché ensuite l’usage des pesticides à cette fin. Des terres en jachère, des fermes ou des élevages immenses, des investissements souvent démesurés mais parfois contraints, et en même temps une impitoyable élimination de ceux qui n’arrivaient pas à suivre.
Serait-ce oublier que l’agriculture a d’abord pour mission de nourrir la planète, et de combattre le fléau de la faim. En ce sens l’objectif de produire plus était légitime, nécessaire, jusqu’à ce qu’il soit atteint. Il a été dépassé, s’en est suivi une poussée à produire toujours plus de manière plus intensive, pour être compétitif à l’export, souvent au prix de dégradations environnementales et de dépendance vis à vis de l’industrie, des intrants. Des politiques qui après 1945 avaient suscité espoir se sont révélées désastreuses : j’invite à lire le livre « histoires des paysans de France » du romancier agriculteur Claude Michelet, qui dans son dernier et 17eme chapitre « le dernier carré » reprend, à travers les propos d’un de ses personnages de romans, une analyse sévère certes mais lucide des politiques agricoles de 1945 à 1985, avec tous ses écarts et courtes vues, le gel des terres, la concentration des productions par un petit nombre, la course à la rentabilité au détriment des petites fermes… une politique ultralibérale qui a encore plus sévi depuis avec la mondialisation débridée et les conséquences que nous savons, sans compter les mesures anachroniques même quand elles se veulent « écologiques » : de bonnes intentions peut-être mais dans certains cas difficilement applicables (directives nitrates par exemple avec les mises au norme) quand dans le même temps la culture et l’élevage intensifs restent encouragés, au détriment de fermes et d’élevage à l’échelle humaine (plus riches en emplois). Ne serait-il pas plus judicieux d’encourager le repiquage de haies et bosquets à intervalles réguliers, de pratiques réduisant la percolation des nitrates dans les nappes plutôt que dans de coûteux dispositifs de stockage ? D’encourager des productions alimentaires diversifiées, les cultures typiquement adaptées aux ragions plutôt que le des monocultures de maïs irrigué ? De réduire la dépendance aux intrants, souvent dérivés du pétrole (engrais, pesticides), appelés à devenir rares et chers ? Les rendements pourraient alors s’en ressentir… ce d’autant plus si la richesse du sol est dégradée et les régulations naturelles des parasites et maladies sont trop inopérantes. Sans compter que les terres stérilisées, couvertes sous le bitume et artificialisées (9% entre 2000 et 2050 au rythme actuel) confisquées à la production alimentaire pourraient faire défaut pour alimenter une population légèrement croissante. Là la faim pourrait bien réapparaître, ici chez nous, aggravée peut-être par une conséquence néfaste des pollutions sur les rendements.
En pratique, sortir de la logique « compétitive » pour revenir à un rôle nourricier, c’est non seulement aux agriculteurs de le réclamer mais aussi aux politiques de donner ce coup de pouce. La production alimentaire ne peut rester dans une logique de guerre économique (tous perdants à long terme surtout nos descendants) ou de monopoly. Favoriser les circuits courts, revenir aux installations de dimensions raisonnables, replanter des haies, encourager les activités annexes : production d’énergie à partir des résidus de biomasse et des effluents (bois, méthanisation…). Cela prendra du temps. Et plus que des subventions, assurer d’abord des prix de vente reflétant les coûts réels de production, quitte à fixer des prix plancher et taxer les produits importés qui détruisent les productions locales. Mais peut-être faudra-t-il désobéir à certaines directives trop libérales…