Compterendu de la sortie d’automne dans le Niederwald
Jeudi 21 Octobre 2021



Cette sortie était organisée par le groupe local d’Alsace Nature – Colmar et environs.

En compagnie de Mr Muckensturm , forestier de l’ONF chargé du site, et de Daniel Reininger , président d’honneur d’ Alsace Nature et représentant de FNE Grand Est à l’agence RhinMeuse, les membres d’Alsace Nature se sont retrouvés sur le site de Natura 2000 Ried Colmar, pour cette sortie consacrés à son espace forestier.

Le Niederwald est une RBD, réserve biologique dirigée incluse dans la Zone Natura 2000 du Ried de Colmar, un rare espace français en protection forte.
Forêt de 545 ha, le Niederwald appartient à la commune de Colmar depuis le Moyen Âge .
Entre les cours de la Fecht et de l’Ill, elle est parcourue par de nombreux ruisseaux phréatiques. La nappe phréatique est à l’étiage à 1,5 m de la surface limoneuse. Les débordements de l’Ill affectent sa partie Est. Elle appartient aux écosystèmes alluviaux entre Colmar et Strasbourg des Rieds gris et bruns.

Sa population forestière

Les essences de feuillus ont été évolutives. L’orme très présent (15% en 1920) a été décimé fin du XXe par la graphiose (mycose disséminée par un scolyte), permettant la progression du frêne qui s’est imposé comme essence principale (40% en 1999) et qui, à son tour, est victime de la chalarose, mycose d’origine asiatique qui s’est propagée au nord de la France depuis 2005.

Les arbres atteints seront abattus, le bois de cœur (duramen) étant toujours utilisable. La sécurisation de la forêt est aussi en question.

Les essences majoritaires sont le frêne, l’aulne glutineux, les érables sycomores et champêtres, chênes pédonculés. Deux espèces exogènes, remarquables et bien adaptées ont été introduites au XIXe s. : le noyer noir d’Amérique et le Hickory (Carya) qui pourraient s’étendre sans la contrainte règlementaire.

Elle est traitée en futaie irrégulière permettant la régénération naturelle par bouquets.

Réserve Biologique Dirigée (RBD) et Zone Natura 2000 : une double protection

La gestion de la forêt est confiée à l’ONF qui établit des plans d’aménagements quinquennaux.

Depuis 2013 elle a été classée en RBD qui doit concilier des enjeux à la fois de préservation patrimoniaux et économiques.
Une RBD confère un statut de protection forte, spécifique aux espaces relevant du régime forestier c’estàdire, les forêts de l’Etat (domaniales), les forêts des collectivités ou d’établissements publics (communes, départements, Conservatoire du littoral…)

Rappelons que la France est à la traine en Europe avec moins de 2% de son espace en protection forte. Les ambitions présidentielles affirmées en 2019 sont de 10% en 2030.

Un premier plan de gestion 20092015 du Niederwald a été établi.
Il a été choisi de maintenir une sylviculture permettant de guider la tendance évolutive. La dynamique de croissance du frêne et de l’érable étant la plus forte elle aurait dominé la croissance d’autres espèces plus héliophiles. L’objectif est de garder la résilience de la forêt en favorisant des mélanges d’essences par une mise en lumière favorable, et développer une structure étagée laissant
de la place aux espèces de 2e ordre (chênes) ou arbustives (noisetiers, fusains, sureau).
Le niveau de protection de la RBD va audelà du plan d’action de la Zone Natura 2000 par la surface plus importante
d’arbres définitivement laissés en place :  2/ha (arbres biologiques), de 2 îlots de senescence de 28,3 ha au total soit 5 % de la surface de la foret ha en « libre évolution » par abandon définitif des bois pendant 30 ans, permettant aux arbres d’accomplir la totalité de leur cycle de vie et offrant des habitats propices aux espèces patrimoniales (pics , chauve-souris)


Faune (inventaire de 2001)

6 espèces de batraciens (2 de grenouilles, 2 de crapauds, absence du sonneur au ventre jaune,2 de tritons,)
47 espèces d’oiseaux nicheurs, dont les 6 espèces de pics de l’avifaune alsacienne (ex le rare Pic cendré)
9 espèces de chauvesouris
13 espèces de poissons dans les eaux pures (mais peu oxygénées) des ruisseaux phréatiques
La loutre a été réintroduite en 1998, son suivi a été arrêté en 2003.
Les ongulés : 30 chevreuils /100 ha en 1999, quelquess dizaines de daims (lâchés au XIX e s dans la forêt de l’Illwald), grosse population de sanglier. 
Lièvres, chats sauvages, renards, blaireaux, putois, rats musqués, ragondins complètent le cortège.


Flore (2001)

120 espèces ont été inventoriées, dont 4 en liste rouge Alsace.

 


Les ruisseaux phréatiques

Face au risque d’envasement par suite des inondations moins puissantes qui exerçaient un « effet de chasse », plutôt que de curer il a été choisi de creuser au niveau des exsurgences de la nappe .

 

La sylviculture : planter sans se planter. Questions à propos de la chasse.

Comme nous l’avons vu, la forêt est victime d’agressions fongiques telles que la chalarose du frêne ou la graphiose des ormes, ou d’invasion par les plantes exotiques envahissantes telles que la renouée du Japon ou la balsamine de l’Himalaya et doit pouvoir se renouveler pour assurer du bois d’œuvre de qualité (objectif secondaire ). Ainsi l’ONF prévoit de planter 2500 jeunes chênes de pépinières de la vallée de la Saône (dans quelques années nous aurons le climat de la vallée de Lyon selon les prévisions climatiques), qui devront être protégés de l’abroutissement par les ongulés, en installant de clôtures de 2 m de hauteur sur 1 Ha. 

Nous avons abordé la problématique de la chasse et de la question de la régulation des ongulés en l’absence de prédateurs naturels (plan de chasse pour les chevreuils avec des quotas maxi/mini, absence de plan pour les sangliers ). Pourquoi ne pas faire effectuer une régulation efficace par des agents? comme cela se pratique dans des cantons de Suisse ? Citons au passage la déclaration
récente du distingué président des chasseurs de France : « Les régulations ,je m’en fous ! » Les pesanteurs sociologiques (le plaisir de chasser, les relations sociales etc..) ou économiques par le revenu assuré à la commune d’environ 23.000 €/an ne permettront pas une remise en cause prochaine ….

Toujours sur le plan économique la forêt rapporte bon an mal an environ 150.000 € à la ville de Colmar. Des grumes partent directement en conteneur vers la Chine …

Il a été discuté de l’avenir des agents de l’ONF et de son rôle : voir les articles suivants de Reporterre : https://reporterre.net/VeilleedarmespoursauverlONF
et https://reporterre.net/ForetspubliqueslEtatreflechitaudemantelementdelONF
Cette évolution mettra en difficulté et est en contradiction avec la volonté de créer de nouvelles RBD et RBI (intégrale).

Mr Muckensturm et Max son chien devant le « Gros chêne » abattu par la tempête



Après avoir visité un ilot de sénescence, nous avons rendu visite aux arbres remarquables classés par le département du Haut Rhin et l’ONF tel le gros chêne abattu par la tempête du 27/02/2020 (25m3 au sol) ou le noyer noir et les caryas centenaires et hauts de plus de 35 m tout proches.

Voir aussi le communiqué d’Alsace Nature sur l’avenir des forêts