TOUT SAVOIR SUR… Le contournement de Châtenois (67)

1.    Historique et implication d’Alsace Nature

Initialement prévu pour une mise en circulation en 2006-2007, le dossier a fait l’objet d’un recours contre la Déclaration d’Utilité Publique (DUP) par les viticulteurs qui ont obtenu gain de cause en décembre 2003. Alsace Nature avait aussi engagé un recours en septembre 2001, qui a donné lieu à un jugement favorable à notre association.

2012, l’enquête publique sur la DUP est relancée, le 10 octobre elle est publiée au Journal Officiel, mi-décembre Alsace Nature engage un recours gracieux contre la DUP.

Fin de l’été 2019, la phase 1 des travaux démarre. Le 24 décembre, Alsace Nature dépose un référé suspensif (pour ce dernier nous n’avons pas été suivis par les tribunaux, donc les travaux ont pu continuer) ainsi qu’un recours au fond contre l’arrêté préfectoral portant sur l’autorisation environnementale (jugement du TA de Strasbourg qui nous est favorable en mai 2023 et demande l’arrêt des travaux).

12 mai 2023, les travaux sont arrêtés alors qu’ils ont atteint 90 % de réalisation. Les parties adverses (l’Etat et la CeA) font appel de la décision et demandent un sursis à exécution (c’est-à-dire une décision juridique, qui autorise à ne pas exécuter la peine prononcée, à savoir l’arrêt des travaux).

20 juillet 2023, la Cour d’Appel de Nancy propose une « médiation », que notre association va décliner publiquement le 1er aout.

Septembre/octobre 2023, suite au retrait des conditions préalables à la médiation imposées par la CeA (initialement jugées inacceptables par notre association), Alsace Nature a enfin pu accepter d’entrer dans la médiation juridique.

NOTRE ANALYSE Nous avons, en amont de ce vieux dossier systématiquement fait part de notre opposition et des arguments qui plaidaient pour une non-réalisation de ce scénario. Nous l’avons à nouveau souligné dans toutes les phases de concertation dans le cadre de l’instruction du dossier. (cf. bilan d’activité de l’année 2012) La décision de commencer les travaux et de les avancer le plus rapidement possible relève bien de la responsabilité de l’État et de la CeA. Aucun des deux acteurs ne pouvait ignorer ce qu’il adviendrait en cas de jugement défavorable au projet routier et les montants aujourd’hui annoncés en pure perte le sont du fait de cet « excès de confiance ».

2.    Rappel des grands enjeux

 

    • Ce dossier vieux de plusieurs décennies continue d’être porté aujourd’hui, alors que la situation climatique, la disponibilité en Eau et l’effondrement de la biodiversité n’ont jamais été aussi dramatiques. Pour 2023, le 2 aout est le jour de dépassement, c’est-à-dire qu’à partir de cette date nous consommons plus de ressources naturelles que la planète ne peut en produire en une année. Nous vivrons à crédit les 5 prochains mois de l’année !
    • Une voie ferrée existait et, bien que démontée aujourd’hui, le tracé reste toujours présent. Une part de solution ferroviaire pouvait totalement être envisagée sur ce site avec un système de parking relais au débouché des deux vallées.
    • Un tunnel qui peine à trouver sa rentabilité : Suite à l’accident du tunnel du Mont Blanc, le tunnel Maurice Lemaire a fait l’objet d’une mise aux normes et d’une réouverture en octobre 2008. Dès cette époque il était prévu que le trafic des camions poids lourds soit interdit dans les cols vosgiens (et notamment Sâales, Le Bonhomme et Bussang). Une quinzaine d’année plus tard force est de constater que nous n’y sommes pas. Cette fois-ci, ce serait parce que le contournement n’existe pas, et demain il s’agira du gabarit de la RN 59 qui ne va pas… et ainsi de suite.
    • Un goulet d’étranglement à la sortie du Val d’Argent et du Val de Villé. Le secteur de Châtenois-Scherwiller accueille les débouchés des deux vallées et présente une trouée dans les collines sous-vosgiennes. Cette particularité a conduit au développement de milieux naturels spécifiques. En effet la présence de deux rivières (la Liepvrette et le Giessen) qui se rejoignent au profit de la trouée géologique vers la plaine, a conduit au développement de prairies inondables et de leur cortège de faune et de flore.

 

3.    Les motifs de nos recours

Destruction des zones humides  – Espèces protégées – Raison impérative d’intérêt public majeur

Les raisons de l’opposition d’Alsace Nature à ce projet sont les mêmes depuis le début :

    • Il s’agit résolument un projet du passé, issu de l’époque où, quand un bouchon apparaissait, on construisait une nouvelle route. Cela a conduit notre région à connaitre un réseau de mobilité d’une densité hors du commun (la plus haute de France, après Paris !)… et l’ensemble des dégâts environnementaux qui l’ont accompagnée.
    • la localisation même du projet, son tracé et les choix qui ont été réalisés conduisent à des impacts extrêmement conséquents sur la faune, la flore, les zones humides et les fonctionnements écosystémiques. À ce titre la loi pour la reconquête de la biodiversité prévoit une procédure d’évaluation (nommée séquence éviter-réduire-compenser (ERC)) et conclut que si les impacts sont trop importants il faudra revoir l’implantation du projet. Nous sommes pleinement dans ce cas de figure et en lieu et place d’une réflexion alternative seule la mise en œuvre de compensation est envisagée. Or, à l’heure actuelle, les compensations sont d’une part mise en œuvre que partiellement (97% de la compensation qui devait être mise en œuvre avant le début des travaux est aujourd’hui existante) et surtout elles ne répondent nullement aux enjeux qu’elles sont censées compenser :
        • du le transfert des 1200-1500 bulbes de Gagée, il ne subsiste plus que quelques dizaines de pieds au grand maximum,
        • sur les 800 bulbes d’orchidées qui s’épanouissaient dans un milieu alluvionnaire il ne reste quasiment rien,
        • la mesure de déplacement des Azurés sur le site de compensation est un échec total avec cette année aucun papillon en vol alors que le site était majeur pour l’espèce.

 

4. Les alternatives qui auraient été possibles

Études alternatives  –  Transport collectif  –  Amendement routier

Nous avons tous besoins de mobilité dans notre société pour travailler, pour les loisirs, pour les rencontres, la culture, les enfants la famille etc. Longtemps notre pays s’est construit sur le tout routier et « mobilité » a été confondu avec « voiture personnelle ». Les congestions partout présentes, et la question de la pollution de l’air nous imposent de revoir cette logique. Ces changements de comportements impliquent évidemment un mix de solutions, or il est reconnu que la résistance aux changements est forte : nous entendons souvent que ce n’est pas réaliste. Ce fut aussi le cas pour le TER ou pour le tram qu’aujourd’hui plus personne ne remet en cause. Les solutions alternatives que nous n’avons eu de cesse de répéter et qu’il aurait fallu étudier sérieusement sont :

    • travailler sur la question des déplacements pendulaires domicile-travail (principalement vers Sélestat) avec un parking relais soit sur la voie ferrée remise en état, soit avec des bus (éventuellement en site propre), voire les deux,
    • étudier plus finement la possibilité de s‘appuyer sur la route existante, à savoir proposer des aménagements (c’est en l’occurrence une des conclusions du Tribunal Administratif de Strasbourg),
    • imaginer un autre tracé qui ne vienne pas amputer la zone du Giessen. Le projet initial empruntait un tracé par les vignes (cf. plus haut : les viticulteurs ont eu gain de cause) mais le nouveau contournement n’empruntera pas ces terres agricoles. En quoi la « nature non-cultivée », en particulier lorsqu’elle est remarquable (site et espèces protégées) serait plus encline à être détruite ?
    • en dernier recours : la création d’un ouvrage le moins impactant possible (passage en viaduc sur la zone du Giessen).

 

5.    Conséquences de la réalisation du contournement

Transfert de circulation  –  Pollution

Le projet est annoncé comme permettant la mise en œuvre d’un rabattement des camions présents dans les cols vosgiens par cet unique passage. Ce serait à minima 3000 camions par jour qui viendraient grossir la circulation sur Châtenois. Le second argument est de dire qu’un camion dans un embouteillage pollue bien plus qu’un camion qui roule. Cependant sur les 5 km de contournement, les véhicules croiseront bel et bien deux giratoires qui impacteront aussi un peu plus la fluidité du trafic. Par quel miracle les bouchons qui se créent aujourd’hui du fait des giratoires disparaitraient, et leur nuage de pollution avec ?

Liaison routière A4 Lorentzen : Mobilisation dans le cadre de l’enquête publique en cours

Liaison routière A4 Lorentzen : Mobilisation dans le cadre de l’enquête publique en cours

Une enquête publique, au titre de la loi sur l’eau, est en cours jusqu’au 13 juin 2023 à midi , au sujet du projet de liaison routière A4-Lorentzen. Il s’agit d’une des dernières étapes avant la validation globale du projet. Nous vous invitons à y participer en nombre !
De plus, une mobilisation est prévue les 10 et 13 mai avec des naturalistes pour dénoncer ce projet autoroutier climaticide et écocide. (cf infos à la fin de cet article)

 

Arrêté préfectoral du 17 avril 2023 – avis d’enquête publique :

https://www.bas-rhin.gouv.fr/contenu/telechargement/50918/373287/file/2.%20AP%20ouverture%20EP.pdf

 

Le dossier peut être consulté par le public

– Sur support papier en mairie de Diemeringen , aux jours et heures d’ouverture de la mairie
– Sur un poste informatique en mairie de Diemeringen , aux jours et heures d’ouverture de la mairie
– Sur le site internet de la préfecture : https://www.bas-rhin.gouv.fr/Actions-de-l-Etat/Environnement/LSE-Loi-sur-l-Eau-Secheresse/Installations-soumises-a-autorisation/Communes-J-K-L >> commune de Lorentzen sous la rublrique « Liaison routière RD18 : A4 – Lorentzen – Bitche »

 

Comment participer ?

Pendant la durée de l’enquête, vous pouvez formuler vos observations
– Sur le registre d’’enquête à la mairie de Diemeringen , aux jours et heures d’ouverture de la mairie
– Par voie postale à l’attention du commissaire enquêteur à la mairie de Diemeringen (10, rue Paul Paray 67430 DIEMERINGEN)
– Par courrier électronique à : pref-enquetes-publiques@bas-rhin.gouv.fr en précisant l’Objet : Enquête publique « Projet de Liaison routière RD18 : A4 – Lorentzen – Bitche »

 

Historique du dossier

Pour rappel, ce projet de connexion routière de 6 kilomètres, évalué à environ 16 millions d’euros à la charge du Conseil départemental, était dans les cartons depuis la construction de l’autoroute A4 entre Paris et Strasbourg. Cette route avait pour vocation initiale de renforcer les liaisons avec le pays de Bitche (Moselle).

Les premières études environnementales menées en 2005 étaient largement insuffisantes quant à la prise en compte des enjeux naturalistes, notamment sur le Morstberg. Le Conseil départemental du Bas-Rhin a fait procéder à de nouvelles études en 2010 et 2011 ; celles-ci ont mis en lumière pas moins de 11 habitats naturels et de 90 espèces d’intérêt patrimonial inscrites sur les listes rouges qui ont été observées en une seule campagne de prospection.

En raison de la richesse biologique exceptionnelle du site impacté par le projet de liaison routière entre l’A4 et le village de Lorentzen en Alsace Bossue, Alsace Nature avait déposé en 2011, un recours devant le tribunal administratif pour faire annuler la prorogation de Déclaration d’Utilité Publique du projet (datant de 2006). Cela avait conduit le Conseil départemental à essayer de mettre en place une médiation. De leur côté, certains élus ont très vivement réagi contre Alsace Nature, qualifiant les militants associatifs de « terroristes environnementaux » dans une lettre ouverte et allant jusqu’à menacer de détruire des milieux naturels – menaces en partie concrétisées par la destruction de haies et du surpâturage programmé dans certaines prairies…

En dépit de la tension forte sur ce dossier, un protocole d’accord assurant une meilleure prise en compte de l’environnement a finalement été signé par les différentes parties en 2013 (Conseil départemental, élus locaux, Alsace Nature). Une modification du tracé a été concédée, ainsi que le maintien des bonnes pratiques de gestion agricoles et l’élaboration d’un Arrêté Préfectoral de Protection de Biotope (APPB) concernant les zones à enjeux dans le secteur. À l’issue de ces discussions, Alsace Nature s’est désistée de son recours et le tribunal en a pris acte le 6 août 2013.

Ainsi, depuis 2013, ce projet a fait l’objet d’un important travail de la part des associations naturalistes rassemblées sous l’égide d’Alsace Nature afin d’évaluer justement les impacts. Malgré tous ces efforts, nous constations dès 2013 et de manière régulière des destructions de milieux naturels (arrachage de haies, destruction de prairies,…). Le 4 août 2016 verra la publication de l’APPB qui devait permettre, comme nous l’avions imaginé au moment du protocole de 2013, la protection de ces mêmes milieux naturels, donc l’espoir de voir ces destructions sauvages cesser.

Pourtant en août 2016 nous constations à nouveaux des destructions de haies.
Début novembre 2016, de nouveaux arrachages de haies ont été constatés dans le lieu-dit Witterholz sur la commune de Thal-Drulingen. En février 2017, les destructions prennent une tout autre dimension avec non seulement l’arrachage de haies mais aussi le retournement de prairies dans des secteurs où ces pratiques sont totalement interdites.

Alsace Nature, la LPO et l’ANAB (Association Nature Alsace Bossue) organisaient vendredi 24 février 2017, une conférence de presse en Alsace Bossue, pour dénoncer les destructions de milieux naturels dans le cadre des opérations d’aménagements fonciers liés au contournement routier de l’A4-Lorentzen.
Le site du Morstberg notamment, exceptionnel du point de vue de la biodiversité, a subi des dégradations (retournement de prairies, arrachage de haies …) d’autant plus inacceptables qu’il venait de faire l’objet d’un classement en arrêté préfectoral de protection de biotope.

 

Quelques arguments contre ce projet :

– une alternative bien moins destructrice en s’appuyant sur le tracé de la D92 qui contourne le Morsberg
– 101 espèces et milieux protégés selon le rapport intermédiaire d’Ecolor,
– fragmentation d’un réservoir de biodiversité,
– le plus bel espace à papillons de jour d’Alsace-Lorraine (65 espèces)
– une efficience des mesures compensatoires non démontrée à ce jour,
– de la pollution supplémentaire liée à une augmentation du trafic routier,
– une déclaration d’utilité publique qui date de 17 ans ! Or, le contexte a changé, notamment pour ce qui concerne le déclin de la biodiversité (en 40 ans 75% de la biomasse des insectes ainsi que 60% des oiseaux ont disparus de nos campagnes) et l’urgence climatique (le réchauffement climatique nous impose de réduire drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre ( -50% à l’horizon 2030 selon le gouvernement )

 

Mobilisation avant la fin de l’enquête publique !

Alsace Nature soutient l’ANAB (association Nature Alsace bossue) et un collectif d’associations et de citoyens qui organisent les 10 et 13 JUIN 2023 des sorties nature et rassemblements pour dénoncer ce projet d’un autre âge. En plus de votre participation à l’enquête publique, nous vous invitons à participer nombreux à ces rassemblements :

Le samedi 10 JUIN – 14H – Lorentzen
Balade et interventions naturalistes avec l’ANAB
RDV : parking à l’entrée de Lorentzen en venant de Diemeringen

Le mardi 13 JUIN – de 10H à 13H
Devant la mairie de Diemeringen pour transmettre les dernières remarques au commissaire enquêteur.

 

Informations complémentaires :

mai 2023 – Article des DNA
https://www.dna.fr/environnement/2023/05/12/a4-lorentzen-une-derniere-enquete-publique-avant-les-travaux

Novembre 2020 – Article GCO Non Merci
https://gcononmerci.org/revue-de-presse/liaison-a4-lorentzen-avis-negatif-du-cnpn/

24 février 2017 – Alsace Bossue : les associations dénoncent des destructions illégales de milieux naturels : https://alsacenature.org/reseaux-thematiques/agriculture-3/alsace-bossue-les-associations-denoncent-des-destructions-illegales-de-milieux-naturels/

octobre 2012 – Lettre ouverte d’Alsace Nature : https://alsacenature.org/reseaux-thematiques/amenagement-du-territoire/a4-lorentzen-lettre-ouverte-au-maire-de-diemeringen/

 

[Communiqué de Presse] Contournante de Châtenois : l’arrêté est bien illégal !

[Communiqué de Presse] Contournante de Châtenois : l’arrêté est bien illégal !

Dans une décision du 12 mai 2023, le Tribunal Administratif (TA) de Strasbourg annule, sans accorder de possibilité de régularisation, l’autorisation préfectorale sur les enjeux de biodiversité.

Dans le même mouvement, concernant les enjeux sur la ressource en eau – le tracé choisi l’ayant été sur des zones humides de plus en plus rares – il ordonne la réalisation d’études supplémentaires dans un délai de 8 mois pour démontrer le respect de l’équivalence fonctionnelle et l’absence de perte nette de biodiversité des mesures compensatoires des zones humides, l’État et la Collectivité Européenne d’Alsace (CEA) n’ayant pas été en mesure de démontrer en quatre années de procédure qu’ils respectaient la législation sur l’eau.

Au regard de la gravité des illégalités, le TA va au-delà des conclusions de la rapporteure public qui proposait de régulariser l’autorisation et de suspendre en attendant les travaux le temps que ces procédures soient conduites : les magistrats ont annulé intégralement l’autorisation stoppant net les travaux en cours.

Le signal fort envoyé par le TA dans ce dossier – comme il l’avait fait d’ailleurs sur le dossier du Grand Contournement Ouest de Strasbourg (GCO) – doit être entendu : il est temps de penser la nécessaire protection des ressources en eau et la protection de la biodiversité comme cruciales, bien au-delà des seuls objectifs de gestion des flux de marchandises par transport en camions.

Loin de crier victoire les associations de protection de la nature ne peuvent que faire le triste constat qu’il aura fallu attendre presque 4 ans et le terme de cette procédure pour que les enjeux, pourtant mis en avant par elles lors de l’ensemble des phases de consultation et les échanges écrits de la procédure administrative, soient enfin reconnus.

Dans le dossier du GCO, l’État emporte une victoire à la Pyrrhus uniquement liée au fait que l’autoroute était déjà construite au moment où il a statué. Pour la contournante de Châtenois, tout porte à croire que le même processus était en marche. Le TA vient de signifier fortement que la politique des terres brulées n’est plus envisageable.

Les citoyens, rassemblés au sein des associations de protection de la nature, appellent les collectivités et l’État à repenser la prise en compte des enjeux de biodiversité dans les dossiers de mobilités qu’ils portent.

Depuis trop longtemps des séquences Éviter-Réduire-Compenser (ERC) sont conduites avec légèreté pour aboutir à des pseudo mesures compensatoires qui justifient des projets bien trop destructeurs. L’absence d’équivalence fonctionnelle conduit à la terrible extinction du vivant que nous vivons et ne peut, si on souhaite préserver un monde viable, se poursuivre. Les mesures compensatoires doivent aujourd’hui non plus être considérées comme une fin en soi mais comme un aveu d’échec d’une séquence ERC insuffisante. Rappelons que la loi pour la reconquête de la biodiversité prévoit qu’un projet qui présenterait une importante quantité de mesures compensatoires est un projet qui n’est pas au bon endroit. C’est cet esprit qu’il convient de mettre en œuvre dorénavant.

Ainsi, les associations appellent les pouvoirs publics à repenser l’A4-Lorentzen, la contournante de Rothau, celle de Dettwiller, la liaison Altkirch-Mulhouse-Burnaupt, la sécurisation de la RD31bis (qui passe en cœur de réserve naturelle nationale), et bien d’autres encore.

Les associations ne sont nullement dans une posture dogmatique qui voudrait qu’aucune route ne voit le jour mais bel et bien dans une analyse multifactorielle où la nature ne saurait plus servir de variable d’ajustement, mais dont la protection est la condition sine qua non pour que les générations suivantes n’aient pas à subir les choix de la nôtre centrés uniquement sur le développement des routes.

A l’heure où les politiques publiques de protection de certains espaces sont déployées fortement (stratégie des aires protégées, réserves naturelles régionales ou nationales, espaces naturels sensibles…), et à l’aube de très grands problèmes liés aux changements climatiques, la poursuite d’une non prise en compte des enjeux de protection de la biodiversité serait pour le moins anachronique.

 

REVUE DE PRESSE

 

[communiqué] Contournement de Châtenois : Réponse d’Alsace Nature à Monsieur le maire de Châtenois

[communiqué] Contournement de Châtenois : Réponse d’Alsace Nature à Monsieur le maire de Châtenois

Notre association a pris connaissance du courrier envoyé par Monsieur le Maire de Châtenois à Madame la Préfète, retranscrit dans les colonnes des DNA le Mercredi 12 avril sous l’intitulé « Châtenois. Contournement RD1059 : Notre population ne restera pas inactive si le chantier est mis à l’arrêt ».

 

Multiples tromperies

… sur la mortalité routière

Monsieur le maire de Châtenois « trompe » ses citoyens ainsi que les lecteurs des DNA en rappelant la centaine de morts sur cet axe routier de la RD1059 (ex RN59). En premier lieu, comme nous l’avons toujours soutenu, un mort sur la route n’est jamais acceptable et l’opposition entre la mortalité routière et la nécessaire protection des milieux naturels et de la ressource en eau n’a aucun sens.
Mais surtout, ces dramatiques accidents de la circulation n’ont pas eu lieu dans la traversée de Châtenois mais essentiellement sur la partie non concernée par la déviation (entre Châtenois/Val de Villé et Sainte-Marie-aux-Mines) selon les études. Or, la déviation de Châtenois va inévitablement drainer son lot supplémentaire de poids lourds qui risquent malheureusement d’augmenter encore le nombre de victimes, soit tout le contraire du soi-disant bien-fondé « sécuritaire » de ce projet routier.

 

… sur les nuisances (bruit et pollution)

Monsieur le maire évoque aussi et à juste raison les nuisances subies par les habitants situés actuellement le long de la RD1059… mais omet de rappeler que ce sont près d’une centaine de personnes en situation de handicap qui vont dorénavant subir ces nuisances (bruit, pollution atmosphérique…). Leur centre APEI « Le Moulin » sera désormais le bâtiment le plus proche de la nouvelle route distante de quelques mètres à peine. Bien sûr, on leur a cyniquement prévu un mur anti-bruit… et anti-pollution sans doute ! Ces personnes, souffrant d’autisme pour certaines et donc très sensibles au bruit, pourront-elles seulement continuer à profiter encore de leur jardin ?
Concernant la pollution de l’air, un récent article des DNA (11 mars 2023), au sujet du GCO strasbourgeois, évoque une étude commanditée par les Maires des communs avoisinantes, qui montre que la qualité de l’air s’est dégradée (surtout pour le dioxyde d’azote et les particules fines). Concernant « l’asphyxie de la nature » par les bouchons routiers, il faudrait préciser que les habitants de Châtenois seront définitivement privés de plus de 70 ha (imperméabilisation de plus de 13 ha !) de la seule coulée verte (TVB) très proche du village et encore accessible aux personnes âgées, enfants en bas âge et autres promeneurs accédant plus difficilement au dénivelé de la proche montagne. Châtenois subit déjà des nuisances en provenance de l’A35 à l’Est, la déviation en entrainera encore davantage.

 

Coté juridique

Rappelons que l’audience qui s’est tenue au Tribunal Administratif le 6 avril dernier a permis aux différentes parties d’exposer leur vision des choses et à Madame la rapporteure publique de donner une lecture de la situation au regard du droit après quatre années de procédure où toutes les parties (Alsace Nature, la Préfecture et la Collectivité Européenne d’Alsace (CeA)) ont échangé des conclusions dans le cadre de la procédure contradictoire. Or, les conclusions de la rapporteure publique sont effectivement sévères à l’encontre de la conduite de ce projet puisqu’il a été relevé d’une part une méconnaissance sur les équivalences fonctionnelles des mesures compensatoires des zones humides mais aussi une absence de Raisons Impératives d’intérêts Publics Majeurs (RIIPM) qui sont nécessaire pour déroger à la destruction des espèces et des habitats protégés.

Pour le moins, les griefs, soulevés par Alsace Nature, et repris partiellement par la rapporteure publique, sont loin d’être anodins, et ne sont en aucune mesure de simples irrégularités bénignes.

Dans son courrier dont il est question ici, qui parait à l’issue de l’audience, Monsieur le Maire fonde son argumentation sur la mortalité routière et sur les nuisances pour les riverains de l’actuelle route départementale. Or, c’est bien sur ces deux points que les démonstrations n’ont pas été faites, ni par le Préfet ni par la CeA !

Concernant les mesures compensatoires et leur soit disant « caractère exceptionnel », il est là aussi bon de rappeler que la CeA avait une obligation de résultat pour la sauvegarde d’un certain nombre d’espèces protégées. Notre association est présente, aussi bien sur le terrain que lors des réunions du comité de suivi environnemental liées au chantier en cours, et peut certifier qu’à ce jour les mesures compensatoires liées à ces espèces prennent plutôt la direction d’un échec pour ce qui est de la réussite de leur transfert.

Enfin, il est toujours curieux de voir un élu de la République demander au plus haut représentant de l’État en Région de contester d’ores et déjà une décision de justice qui n’a pas encore été prise. Ce type de pression sur un Tribunal au cours d’un délibéré n’est pas acceptable et nous souhaitons vivement que Madame la Préfète rappelle cela à Monsieur le Maire de Châtenois.

 

Il faut changer de logiciel, et vite !

Nous attendons toujours que Mr le maire de Châtenois, et les « élus du territoire qui (selon lui) se sont engagés pour ce projet », fassent preuve publique de leur dynamisme pour éviter de condamner le Val d’Argent en « Couloir à camions », comme planifié par un certain nombre d’acteurs publics et privés, avec pour conséquences un accroissement inévitable du trafic, des bouchons, des accidents mortels, du bruit, de la pollution de l’air, voire d’une pollution majeure du Giessen tout proche (tout le monde a encore en mémoire la pollution de la nappe phréatique à Benfeld par le renversement d’un camion-citerne, et dont la collectivité continue aujourd’hui encore de payer les frais).

Si seulement les pouvoir publics appliquaient ce raisonnement à une autre mortalité inacceptable : en France, 35,2 % de tous les décès liés à la chaleur peuvent être attribués au changement climatique et pourtant les solutions pour atténuer ses effets sont largement connues, mais peu appliquées. Ainsi Châtenois n’est pas plus qu’une autre commune, protégée des effets du changement climatique, et ce dernier entrainera aussi des décès prématurés. Alors que nous avons traversé un été 2022 catastrophique et que les prévisions pour l’été à venir sont encore moins optimistes, il est curieux de légitimer la destruction des milieux naturels (véritable climatiseurs naturels) et le non-respect des milieux aquatiques et humides au nom du seul besoin de sécurité routière.

Enfin, face aux enjeux du vivre ensemble dans un contexte de bouleversement climatique, il nous apparait qu’il y a mieux à faire que de traiter la société civile organisée, ainsi que le Tribunal Administratif de Strasbourg de « lobby […] qui s’est enfermé dans des visions sectaires de la société ». La fébrilité ne peut pas justifier tous les propos.

Pour toutes ces raisons, Monsieur le Maire, votre « combat » et vos réflexions sont d’un siècle révolu et ne correspondent plus aux enjeux planétaires actuels, ni même aux enjeux de sauvegarde de la biodiversité dont l’effondrement est unanimement reconnu.

 

REVUE DE PRESSE

 

Décès de Daniel Walter

Décès de Daniel Walter

Nous avons la grande peine d’apprendre le décès de Daniel Walter, Président de Thur Ecologie Transports, association de Saint Amarin, avec qui il a rejoint Alsace Nature depuis de longues années et participé aux instances dirigeantes.

De militant syndical dans son usine à Thann, il est passé à la défense sans faille et sans interruption de toutes les causes justes de l’humanité, dont l’écologie. Dans son engagement premier contre la déviation de la RN 66, évitée grâce à un recours, il a très vite compris la nuisance de toutes les pollutions masquées sous le visage du progrès, et rejoint toutes les actions militantes, souvent menées par lui-même  avec le soutien organisationnel de son épouse Annette, engagée comme lui. C’était la défense farouche de la tranquillité du massif face aux camions, du train dans la vallée, la lutte contre l’incinérateur d’Aspach le Haut, contre Stocamine, contre un projet polluant d’usine à Malmerspach.

Il rejoignait tous les combats proches ou lointains, Fessenheim, Bure, GCO, Tunnel du Mont Blanc, Notre dame des Landes, etc Impossible de tout citer ; une vie entière passée dans les actions.

Parmi ses grands investissements nous pouvons citer les Journées des énergies renouvelables à St Amarin de 2001 à 2007, ainsi que le lancement d’un toit photovoltaïque citoyen à Aspach le Bas ou encore le Festival du film, co-organisé avec ACCES et FESTI-DEBAT, deux autres associations de la Thur et de la Doller.

Un homme entier, au style abrupt, mais tellement averti et tellement rapide à agir et à mener des actions  qu’il était un défi pour tous ses amis. Constamment dans les villages pour informer, tracter, écrire aux élus et monter sans cesse des conférences.

Après la menace des ondes et la 5G, après les pesticides et les sorties Coquelicots, Daniel Walter a centré son action sur la menace climatique et la biodiversité, convaincu que toutes les espèces vivantes étaient liées. Il a réclamé, en commun avec le groupe local Thur-Doller, des assises sur le climat, l’agriculture et la forêt en lien avec l’eau. Dernièrement c’est le risque d’inondations et le rejet par les communes du Plan général des risques d’inondation que nous avons dénoncés ensemble.

Et c’est en commun que la Marche pour le Climat a été mise sur pied à Wesserling encore cette année 2022 au mois de mai.

Daniel était un grand homme et Alsace Nature tient à partager sa peine  avec Annette, Vincent, Robin, Thur Ecologie Transports et les associations amies.

Gardons sa pugnacité en tête et que son exemple inspire de nouvelles générations pour poursuivre le combat de protection de la nature et de la Terre que nous menons tous.